le Dimanche 1 juillet 2001

Recours collectif des sinistrés du déluge

Plusieurs facteurs expliquent l’entente

Les risques inhérents à un jugement de cours et les longs délais d’appel faisant en sorte que les sinistrés du déluge de juillet 96 auraient pu attendre pendant encore des années avant de pouvoir toucher un cent, font partie des facteurs qui ont incité l’avocat du recours collectif contre le gouvernement du Québec, Me Serge Simard, de conclure une entente hors cours.

Mardi, Me Simard devra convaincre le juge Jean Lemelin d’approuver l’entente survenue le 19 juin avec les procureurs du gouvernement du Québec.

Selon les termes de cette entente, les membres du recours collectif intenté par Jean Lemay au nom des sinistrés des rivières Chicoutimi et aux Sables et du ruisseau Deschêne à Arvida vont se partager 8,5 millions de dollars. On soustraira de cette somme les honoraires de leur avocat Serge Simard, qui touchera 15% de la somme. Ceux du lac Kénogami, représentés par Jeannine Arseneault, toucheront 1,5 million $ desquels Serge R. Simard, l’autre avocat au dossier, prélèvera 20%. Les deux avocats rembourseront dès lors les honoraires qu’ils ont reçues du Fonds d’aide aux recours collectif. Les sinistrés qui ont déjà reçu différentes indemnités n’auront aucun montant à rembourser, ni au gouvernement, ni aux assurances et encore moins à la Croix-Rouge.

Québec paiera en plus les frais d’expertises de 1,3 M$ avancés par le Fonds. Le gouvernement achète les expertises que devaient utiliser les sinistrés pour tenter de le faire condamner, ce qui évitera qu’elles ne tombent entre les mains d’autres poursuivants.

De plus, l’entente stipule que Québec ne reconnaît nullement sa responsabilité dans les événements de juillet 96.

Huit motifs

Dans un document qu’il a déposé cette semaine en Cour supérieure intitulé « Requête pour approbation de transaction », Me Simard invoque huit raisons qui l’ont poussé à négocier une entente avec le gouvernement et à accepter l’offre faite.

Tout d’abord, soutient l’avocat, « un procès aurait comporté des risques négatifs et des difficultés de preuve que la transaction permet d’éviter, tant au niveau de la responsabilité que des dommages ».

De plus, « en l’absence de transaction, un procès collectif en 2001, les appels probables devant d’autres juridictions et la tenue de procès individuels pour fixer les dommages individuellement auraient non seulement généré des coûts publics très élevés, mais aussi reporté un résultat final hypothétique à plusieurs années ».

Or, selon Me Simard, la procédure actuelle fait en sorte qu’on peut assurer une redistribution concrète d’indemnités au plus tard en février 2002. Selon lui, l’entente tient compte de la quantité et la nature de la preuve recueillie, tant au chapitre de la responsabilité que de celui des dommages subis, y compris les compensations obtenues de différentes sources par les membres du groupe. Les modalités et conditions de l’entente (appelée transaction), telle que rédigée, favorisent une exécution de celle-ci dans des conditions favorables aux membres, à l’établissement d’une réclamation et une perception proportionnelle relativement rapide.

En effet, l’aide sera accordée à tous les sinistrés qui ont subi des dommages, peu importe leur nature. L’avocat du recours a voulu ainsi éviter à ses clients l’odieux d’avoir à faire la preuve de ces dommages cinq ans plus tard et de compliquer la procédure.

Le montant accordé à chacun sera proportionnel à l’évaluation municipale uniformisée de 1996, ce qui sera facile à calculer. Le propriétaire d’une résidence principale touchée par l’eau inondante en juillet 96 réclamera 8% de son évaluation municipale pour la perte de valeur économique de sa propriété, 10% pour la perte d’aménité, troubles et inconvénients, et 10% pour les dommages moraux et psychologiques.

Parce qu’ils n’ont reçu aucune aide pour la reconstruction de leurs chalets, les propriétaires de résidences secondaires réclameront, en plus, 85% de leur évaluation municipale uniformisée pour couvrir leurs frais de reconstruction s’ils ont subi une perte totale et 35% pour une perte partielle.

Quant aux occupants locataires dont les biens ont été touchés par les eaux inondantes, ils recevront 50% de la réclamation moyenne obtenue par les propriétaires à titre de troubles et inconvénients. Le propriétaire d’un terrain vacant qui est devenu non construisible réclamera pour sa part 100% de son évaluation municipale uniformisée.

Ces réclamations individuelles seront prises en proportion des réclamations totales pour établir le prorata que chacun touchera sur l’indemnitée accordée par Québec. On estime qu’il y aura entre 800 et 1000 propriétaires occupants pour les rivières situées en aval et 200 pour les riverains du lac. On évalue qu’il y aura 200 propriétaires de chalets en aval et autant en amont et environ 600 locataires.

Me Simard estime que ces 2000 « portes » représentent entre 7000 et 7200 sinistrés.

Compétence

Me Simard plaide également que cette entente est le fruit d’une conférence de règlement amiable tenue sous la présidence du juge Paul Vézina, un magistrat qui a favorisé les procureurs « de ses judicieux conseils impartiaux » et a bénéficié de l’expérience des procureurs qui ont consacré des milliers d’heures à l’étude du dossier.

L’avocat conclut qu’il y a absence de collusion et plaide la bonne foi des parties.